Un décret d’application de la loi partage de la valeur, paru le 6 juillet, va changer certaines règles du jeu des plans d’épargne en entreprise. Focus sur 4 nouveautés favorables aux salariés.
La boîte à outils de l’épargne salariale s’enrichit. C’est un coup de pouce bienvenu pour les détenteurs d’un plan d’épargne entreprise (PEE). Un décret (1) publié au Journal officiel du 6 juillet en application de la loi sur le partage de la valeur dans l’entreprise crée trois nouveaux cas de déblocage anticipé de l’épargne salariale placée sur un PEE.
Il augmente aussi le plafond de l’abondement de l’employeur sur les plans d’épargne retraite (PER) collectifs. Et prévoit, entre autres, une nouvelle offre d’investissement responsable.
Ces mesures sont issues de l’accord national interprofessionnel (ANI) signé par les partenaires sociaux le 10 février 2023. Ce texte a été repris par le gouvernement dans la loi du 29 novembre dernier sur le partage de la valeur.
Trois nouveaux cas de déblocage anticipé
Les sommes placées sur un PEE sont en principe indisponibles pendant 5 ans, sauf cas de déblocage anticipé. Il était d’ores et déjà possible de récupérer, la totalité ou une partie de son épargne, avant l’échéance dans certaines situations : achat d’une résidence principale, mariage, conclusion d’un Pacs, naissance (ou adoption) d’un enfant (à partir du troisième), rupture du contrat de travail (licenciement, démission), etc.
Trois nouveaux cas de déblocage anticipé sont désormais prévus. Les salariés peuvent débloquer leur épargne avant le terme pour le financement de travaux de rénovation énergétique de la résidence principale, les dépenses réalisées dans le cadre de l’activité de proche aidant (que ce soit le titulaire du plan, son conjoint ou son partenaire de Pacs), ou pour acheter un véhicule « propre » (électrique ou hybride). Sont concernés sous certaines conditions, les voitures, les camionnettes, quadricycles à moteur, les véhicules à deux ou trois roues, et les vélos électriques neufs.
Concernant la rénovation énergétique, sont visés les travaux d’isolation thermique, et d’installation d’équipement de chauffage utilisant une source d’énergie renouvelable. « La possibilité de mobiliser l’épargne salariale est une excellente nouvelle pour la transition énergétique et pour le porte-monnaie des consommateurs », souligne Audrey Zermati, directrice stratégie d’Effy, qui accompagne les propriétaires dans leurs rénovations énergétiques. « Un seul regret », déplore-t-elle : que « l’autoconsommation », autrement dit les panneaux solaires, soient exclus de cette démarche.
Ces nouveaux cas de déblocage anticipé sont censés répondre aux besoins de financement des Français. Reste à savoir s’ils seront suivis d’effet, en particulier pour la rénovation énergétique et l’achat de véhicules propres. Certains professionnels de la gestion en doutent.
« On l’a vu pour d’autres mesures par le passé. Tous les cas de déblocages qui ont été mis en place pour favoriser la consommation n’ont pas eu de succès », estime François Dillemann, directeur commercial Epargne chez Malakoff Humanis. « Les salariés utilisent l’épargne salariale le plus souvent pour une acquisition immobilière ou bien ils laissent leur argent placé sur le long terme. La durée de détention moyenne d’un PEE est supérieure à 10 ans », rappelle le spécialiste.
Augmentation du plafond de versement par l’employeur
Autre bonne nouvelle pour l’épargnant. Le décret paru le 6 juillet augmente considérablement le montant maximal de l’abondement unilatéral de l’employeur sur les plans d’épargne.
« Pour mémoire, à ce jour, l’abondement unilatéral de l’employeur (sans versement du salarié) sur le PEE ou sur le PER collectif est limité à 2 % du PASS (NDLR : plafond annuel de la Sécurité sociale) par an et par plan, soit 927,36 euros devant bénéficier à l’ensemble des salariés. En matière de PEE, cet abondement doit être investi en actions de l’entreprise. En matière de PER collectif, son affectation est libre », souligne François Dilleman.
Or, le décret rehausse le plafond de l’abondement unilatéral de l’employeur aux plans d’épargne entreprise, à hauteur du plafond d’exonération de la prime de partage de la valeur, soit à 3.000 euros voire 6.000 euros, sous certaines conditions.
Une nouvelle offre d’investissement responsable
Un premier décret d’application publié le 30 juin (2) précise également la liste des labels verts qui devront figurer dans les plans d’épargne salariale des fonds au titre « du financement de la transition énergétique et écologique ou de l’investissement socialement responsable ». Sont concernés les labels ISR (investissement socialement responsable), France Finance verte (Green Fin), Relance, Finansol, et comité intersyndical de l’épargne salariale.
La loi partage de la valeur rend en effet obligatoire l’ajout d’au moins un « fonds labellisé » dans un PEE et dans un PER d’entreprise.
Cette obligation s’ajoute à la disposition déjà en vigueur d’intégrer au moins un fonds dit solidaire (dont les fonds servent en partie à financer de entreprises ou des associations de l’économie sociale et solidaire) dans les PEE et PER collectifs.
Possibilité de placer la « prime Macron » sur son PEE
Autre grande nouveauté liée à la loi du 29 novembre 2023 : elle offre aux salariés la possibilité de placer leur prime de partage de la valeur (PPV), anciennement appelée « prime Macron » dans un plan d’épargne salariale (PEE ou PER entreprise).
Le décret du 30 juin précise que les salariés disposent désormais de 15 jours pour faire leur choix. Ils pourront soit placer la somme sur un plan d’épargne salariale, soit récupérer la prime en étant imposé.
Depuis le 1er janvier, les primes de partage de la valeur ne sont plus exonérées d’impôt ou de cotisations sociales, dans une majorité de cas.
(1) Décret N° 2024-690 du 5 juillet 2024 (publié au JO du 6 juillet 2024)
(2) Décret N° 2024-644 du 29 juin 2024 (publié au JO du 30 juin 2024)
Source : Krystèle Tachdjian, Les Echos